« J’ai eu de la chance, ma première pièce a bien marché », la suite s’est enchaînée. Rémi Checchetto, profession : écrivain. Ses spécialités : le théâtre et la poésie. Voilà, la part apparente de son activité. La littérature « c’est du sérieux », une activité qui a d’autres facettes. Une activité qui tourne autour de trois axes (en plus du quotidien consacré à écrire) : les lectures, les ateliers et les résidences.
Écrire nécessite de bouger, d’aller au devant du public. La profession exige d’être par monts et par vaux, d’hôtel en bibliothèque pour répandre la littérature, faire connaître son travail mais aussi partager sa passion du mot. Rémi Checchetto défend une littérature pour tous. « Je dois connaître la plupart des prisons de France, centres pénitenciers, maisons pour mineurs ». Il travaille même dans « les derniers endroits où l’on écrit : le lycée, car pour certains, le lycée est la dernière opportunité de pratiquer l’écriture créative ». À Nantes, avec les élèves du lycée professionnel Bougainville, il a travaillé les mets et les mots. Tant et si bien que la majorité des élèves de l’atelier d’écriture de l’an dernier (onze nationalités pour douze élèves) ont décider de s’inscrire au café philo, où rarement on a vu autant d’élèves allophones, surtout des CAP !
Le moteur de Rémi est l’émerveillement. Celui que peut susciter l’écriture chez des enfants, des adolescents comme chez des habitants d’un village de la Sarthe ou de Saint-Nazaire. Du témoignage d’un professeur de lycée, il ressort que l’écrivain Checchetto possède cette capacité à éveiller la curiosité, à faire voyager par les mots.
La connexion de toutes ses activités (écriture, lecture, atelier, résidence) amène Rémi à s’occuper de « cinquante projets par an ». « Je ne cesse d’essayer de ralentir tout en essayant de gagner ma vie ». Il paraît difficile de s’extraire de ce rythme soutenu. Pour l’instant, Rémi a choisi de mettre en veille les résidences, où parfois, l’on a tendance à user de l’écrivain, multipliant les tâches à sa charge. Lassé de cette activité nomade, il préfère écrire chez lui. Ralentir à un livre par an serait son objectif.
Ses revenus : 10% issus des livres, 10% des ateliers, le restant vient des lectures, résidences et droits d’auteur, notamment ceux du théâtre. Aujourd’hui s’il a des revenus corrects, Rémi Checchetto estime qu’il a fallu vingt ans pour construire ce métier. Cependant ce n’est pas sans l’angoisse du lendemain. D’autant que les changements qui touchent le statut d’auteur (le transfert de l’Agessa vers l’Urssaf) ne sont guère rassurants. Le statut se trouve menacé aussi par la programmation culturelle déclinante, le manque de moyens financiers n’en est pas la seule cause. Rémi Checchetto s’est vu déprogrammé plusieurs fois, la municipalité reniant le choix de sa médiathèque. « Laissez-moi seul » qu’il lit accompagné en musique par Titi Robin, donne la parole à un migrant et nous donne à voir l’homme sous l’autre jour que médiatique. En vingt ans de métier Rémi Checchetto fait l’amer constat d’une continuelle désagrégation de la culture pour tous.
Quand on lui demande de citer un auteur qui l’aurait influencé, il en cite cent. Comment a-t-il choisi ce métier ? « En découvrant une encyclopédie », l’ouvrage l’avait fasciné par son ambition : « Tout l’univers ». Éponyme, son prochain travail d’écriture, constituera un abécédaire en 365 mots. Le conseil de Rémi Checchetto à tout prétendant écrivain « Viser haut ! ». Chez Checchetto la littérature rime avec « essentiel ! ».
Il n’existe pas de cursus typique pour exercer ce métier, la passion en est sans aucun doute l’ingrédient majeur.