Dans son nouveau recueil de nouvelles, La ville aux maisons qui penchent, Marie-Hélène Prouteau propose au lecteur une superbe mosaïque vivante de la ville de Nantes. Lecture par Joël Glaziou.
Trente ans après J. Gracq, qui essayait de cerner “la forme d’une ville”, Marie-Hélène Prouteau tente à son tour, en une vingtaine de “suites nantaises” de restituer l’atmosphère de “la ville aux maisons qui penchent”.
Elle l’évoque de manière poétique, par petites touches, par petites phrases. Mêlant l’histoire et la géographie pour situer la ville “entre maintenant et hier”, “entre eau douce et eau salée”. Rien ne manque au tableau et partout “le souffle de l’océan dilate ses rues”: du pont Tabarly aux quais de la Fosse, de la Tour de Bretagne au passage Pommeraye, des automates géants de Royal de Luxe, des anneaux de Buren aux Jardin des Plantes, des Folies-Siffait en amont à Trentemoult en aval…
Mêlant aussi de manière originale la littérature, la peinture, le cinéma qu’elle convoque en arrière plan pour donner sens à chaque détail : ici, c’est la silhouette fantomatique de William Turner qui fait revivre le commerce triangulaire sur les quais de Salorge et dans les hôtels négriers de la rue Kervégan ; là, c’est un tableau d’André Delvaux ou d’Olga Boldyreff, c’est un poème de Jean Cocteau, une gravure d Rodolphe Bresdin, un livre de Karel Pecka ou d’Yves Landrein, une chanson de Bashung, une scène de “Lola”, le film de Jacques Demy…
Ne se limitant pas aux façades connues de tous et au-delà des clins d’œil de connivence, Marie-Hélène Prouteau entraîne le lecteur dans des déambulations urbaines, qui rappellent certaines dérives des situationnistes dans les lieux oubliés de l’Histoire et dans le secret des ruelles.
Plus qu’une approche pointilliste, c’est un portrait animé, une superbe mosaïque vivante de la ville de Nantes qu’elle propose au lecteur.
La ville aux maisons qui penchent, par Marie-Hélène Prouteau, Éditions La Chambre d’échos, 86 p., 12€, ISBN: 978-2-913904-63-7