Enrobésucrée, de Jasmine Viguier et Valérie Linder

Publié le 09/11/2015 par Claire-Neige Jaunet
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Un ouvrage poétique de Jasmine Viguier, illustré par Valérie Linder, et publié sous le label “

Enrobésucrée : Tout est dit dans ce titre, fait d'un mot qui n'existe pas, et qui pourtant, d'emblée, nous semble familier.

Des mots jamais entendus, le texte en est parsemé : “s'encachveloppe”, “se couvremballe”, “déroulenroule”, “s'enmourmitoufler”, “embaltortillée”. . . Des néologismes que nous adoptons aussitôt, que nous comprenons même si aucun dictionnaire ne nous les explique, car ils cousent ensemble des mots connus, ou des syllabes porteuses de sensations que nous avons perçues. Et, grâce à ces coutures, voilà reliées des réalités éparses qui soudain deviennent une seule et même impression, dont l'évocation nous recroqueville dans un cocon intime où se rencontrent les douceurs de la tendresse, du sucré, du laineux, du soyeux, du chaud et du duveteux.

À la manière de ces mots créés, l'ouvrage relie deux réalités : un texte, et un graphisme. Un graphisme dont le fil conducteur, d'une page à l'autre, est un cordon bleu qui flotte, s'enroule, se déroule, se fait et se refait. Et, tel un cordon ombilical, il conduit, ainsi que le texte, à l'image recomposée de “Petite maman”.

Car c'est bien d'elle qu'il s'agit. Une “Petite maman” tantôt heureuse tantôt inquiète, parfois soupçonnée, qui fait comme elle peut avec les interrogations, et quelquefois les colères qui saccagent les nuits. Une “Petite maman” qui, surtout, ne veut pas laisser “les doutes la fatigue l'isolement” ensevelir le bonheur des “chauds-câlins” et des “douces-caresses”. Une “Petite maman” qui trompe les lassitudes dans le “mangésucrer”, jusqu'à disparaître, enrobée “sous ses kilos sucrés” et ses épaisseurs d'étoffes — écharpes, bonnets, et couches de linges qui la soustraient au monde. Une “Petite maman” qui renaît quand tombent les plus douces paroles : “ça nous va comme tu fais les choses”.

 

Images de mots et images bleues se font écho pour construire à tâtons, en passant par une déconstruction passagère, un univers où la tendresse l'emporte.

 

Enrobésucréé, publié par “<am(i)es”, 33 pp., 7€, ISBN : 978-2-9554101-0-3