Entretien avec Vincent Gillet, directeur de RecycLivre à Nantes.
Nous nous déplaçons gratuitement chez les particuliers de la métropole nantaise à partir de cinquante livres, service que nous proposons aussi aux bibliothèques, aux collectivités, aux entreprises, aux ressourceries, aux associations caritatives, sociales ou orientées vers la culture. Lorsque ces structures peinent à écouler leurs livres, nous intervenons avant la mise au recy-clage en proposant un nouveau circuit de distribution : Internet. Cette mise en ligne signifie une traçabilité des livres, de leur provenance et de leur vente. Si une association nous donne 5 000 livres, quelques mois plus tard nous faisons un bilan avec elle et nous lui reversons environ 0,45 € par livre vendu, ce qui lui permet de générer de nouvelles ressources pour soutenir de nouveaux projets.
Le principe de réversion
L’ensemble des livres récoltés est inventorié grâce à un logiciel développé en interne qui nous permet de savoir si un livre est vendable ou pas à partir de nombreux paramètres, comme l’état, le contenu, le tirage, la date de parution, l’auteur, les taux de rotation, les stocks, etc. Les livres sont ensuite transmis à Ares Services, où quarante personnes en insertion travaillent sur la réception, le stockage (1 200 000 livres stockés) et la préparation des envois des ventes en ligne. Sur chaque commande reçue, 10 % net est reversé à des associations qui travaillent sur l’accès à la culture et la préservation écologique.
Par exemple, l’association nationale Lire et faire lire a pu bénéficier de 75 000 € de réversion en 2018 ; depuis 2016, un partenariat s’est mis en place en Pays de la Loire avec Mobilis. Son but : créer un fonds de dotation afin de soutenir des projets en faveur du livre et de la lecture dans la région. Presque 7 000 € ont ainsi été collectés à ce jour et serviront à initier une réflexion collective sur l’avenir de la filière.
Pour le recyclage des livres invendus ou invendables, nous travaillons à Nantes avec des chantiers d’insertion qui trient et revendent ensuite cette matière à des papetiers locaux. Cette démarche locale nous permet de travailler dans un cercle vertueux.
Un modèle économique responsable
Nous sommes vingt-cinq salariés sur le territoire national, plus les postes d’insertion directe qui regroupent une vingtaine de personnes. Dès le début, David Lorrain, le fondateur, était persuadé qu’il était possible d’obtenir un modèle économique indépendant et un réel impact social et environnemental. Par exemple, à Nantes, toutes les collectes se feront en véhicules électriques à partir de l’été 2019. Sur le site de RecycLivre apparaît le nombre de litres d’eau ainsi économisés, le nombre d’arbres sauvés et la somme totale reversée aux associations grâce aux ventes.
Coopération et complémentarité sur le territoire
Dès notre implantation, nous avons rencontré les associations locales et d’insertion : nous sommes complémentaires sur ce domaine d’action et non concurrentiels. Notre travail est de traiter de gros volumes de livres sur Internet puisque nous n’avons aucun point de vente physique. Nous maillons le territoire Bretagne Pays de la Loire, à travers près de 200 partenariats locaux de collecte, pour permettre de développer des ressources en récupérant ces volumes de livres tout en créant une synergie locale.
L'invention d'une filière durable
Chaque étape de la vie du livre représente un impact économique, social et environnemental. Souvent convoquée au prisme de la…
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