Dans Le voyage masse, Frédéric Barbe dresse le parallèle entre l'écriture et le voyage — et incite au partage pour se retrouver soi et aller vers les autres... Lecture de Carole Poujade.
Embarquement immédiat ! Dès le prélude et la première ligne, le ton est donné. Il est libre, provoquant, cocasse, décalé... et l'on part volontiers à la suite de son auteur... découvrir son regard, celui d'un géographe humaniste, sur le monde d'aujourd'hui, un regard à la fois tendre, réaliste, sans fard. Entre consommation (de masse) et nouvelle économie, l'écrit se fait gentiment contestataire.
Attention, point d'exposé, de doctrine mais une vision résolument ouverte. Les voyageurs, c'est vous, c'est moi, mais ce sont aussi les migrants ou les gens du voyage... De la même manière, l'écriture est une incitation au partage, pour se retrouver soi et aller vers les autres.
Frédéric Barbe fait alterner textes, poésies, mais aussi graphiques et schémas. Nous découvrons avec joie le fruit de quelques-uns de ces ateliers d'écriture qu'il anime. “L’écriture, dit-il notamment, et, par force, le déroulement apparent d'un laboratoire d'écriture se présentent comme celui d'un voyage”. On voyage ainsi entre Berlin, la porte de Brandebourg, la Roumanie ou part à la rencontre drolatique entre un maître zen et un jeune “guerrier de l'économie”.
“Écrire c'est savoir ce qu'on écrirait si on écrivait”, notait quant à elle Marguerite Duras. Précis pour tous ceux qui voudraient se lancer dans la mise en forme de leurs récits de voyage comme dans l'animation d'ateliers, ce livre est une formidable boîte à outils, un encouragement pour tous à pratiquer cet “exercice illégal de l'écriture”. Il est aussi une incitation à “ouvrir des interstices” dans nos “sociétés de domination”, à pratiquer “l'intertextualité” pour des champs de liberté nouvelle dans notre fabuleux “pays des merveilles”.
Le voyage masse, écrire ses récits de voyage aujourd'hui, de Frédéric Barbe, Éditions à la Criée, 168 pp., 12€, ISBN 978-2-910635-07-8