Le dernier recueil de Gilles Baudry, Un silence de verdure, illustré par l’artiste nantaise Nathalie Fréour, atteint une pureté éblouissante avec une économie de moyens, écriture et dessin confondus. Lecture de Patrice Lumeau.
La nature du silence
À chaque poème de Gilles Baudry répond en écho, sur la page opposée, un dessin noir et blanc de Nathalie Fréour. Autant le texte est épuré autant le dessin se fond avec lui. Et si le livre se donne en noir et blanc, il y est énormément question de lumière. En lisant ces lignes on ne peut que penser à des maîtres zen ou quelques moines aventuriers de l’existence. Un silence de verdure, nous donne à entendre, regarder, ressentir. Une leçon d’observation à méditer.
Gilles Baudry touche une vérité universelle où la foi en le moment présent éclate. C’est en fin observateur de la nature que le poète se pose en maître. Tout est là, ici sous nos yeux. L’écrivain à ce talent rare de nous le révéler, comme une photo qui sortirait d’un bain de révélateur ou du sous bois. Le dessin qui accompagne, au-delà de la simple évocation, le dessin lui aussi a ce pouvoir de simplicité qui fait jaillir le tout
Le recueil tel un vent de lumière fait naître un sentiment profond de plénitude. La vie palpite dans ces vers. “Comment ici, / dans ce silence de clairière / ne pas oser cette injonction: / risquez-vous du côté de la lumière”. Chaque texte très court explose. Une bombe de sens et de sensations. Une leçon de joie jaillit des observations du poète. Sans le paraphraser, le dessin de Nathalie Fréour réussit un heureux mariage texte-image. Son encre à la violence du silence, elle fracasse le temps et nourrit le papier blanc.
Parfois bien sûr l’isolement pointe, un sentiment d’abandon presque: “ Le silence / jamais / ne t’a semblé si proche, / jamais / si vaste / la solitude.” L’immensité de l’univers s’esquisse ; mais toujours le bonheur de l’observateur l’emporte: “ S’émerveiller / de ses mystères / rend la forêt plus profonde. / Même le chemin / n’en revient pas.”
Depuis peu on sait que les arbres “parlent” entre eux. Gilles Baudry nul doute murmure avec eux.
La force du haïku habite l’ouvrage, tant dans le trait que dans le mot. Les deux auteurs ont réuni leur énergie pour nous connecter avec bonheur au monde végétal qui nous entoure, au monde tout simplement. Ne pas manquer le dernier texte, où en deux vers l’auteur livre un bel hymne à la vie.
Un silence de verdure, poèmes de Gilles Baudry, dessins de Nathalie Fréour, Éditions L’enfance des arbres, 108 p., 15 €, ISBN: 979-1097516017.