Avec son recueil d’aphorismes Ressentiments distingués, Jean-François Marquet n’a pas les idées courtes ! Lecture de Gérard Lambert-Ullmann.
En littérature, l’aphorisme est souvent considéré comme un genre mineur. Mais il faut reconnaître que c’est un mineur de fonds. Il présente l’avantage de dire en deux ou trois lignes ce que certains mettent des centaines de pages à laisser entendre à condition qu’on ait bonne oreille. Du point de vue du lecteur, c’est du temps de gagné. C’est aussi le lieu où s’est réfugiée une grande partie de la sagesse humaine. Comme le notait Cioran : “Il est préférable de s’en prendre à l’univers, secondé par des aphorismes, que de donner des coups de poings aux abrutis qui nous exaspèrent.” Mais c’est également un exercice risqué : un aphorisme plat et voilà l’auteur dégonflé.
Ne serait-ce que par son titre, Ressentiments distingués, le nantais Jean-François Marquet évite cet écueil. Certes, comme dans beaucoup de recueils d’aphorismes, on a affaire à des remarques inégales. Certaines sont un tantinet faciles. D’autres un peu lourdes. On n’est pas chez Lichtenberg. Mais on tourne la page et une perle excuse tout : “Qui peut affirmer, sans risque de se tromper, que l’erreur est humaine ?” “Parfois, c’est en tenant sa langue qu’on tient parole.” “Au concours de circonstances ce sont toujours les aggravantes qui gagnent.” “Les gros dormeurs marchent en crabes.” Et, d’actualité : “Un homme qui se présente aux présidentielles est un homme qui promet.”
Non, l’auteur d’aphorisme n’a pas les idées courtes !
Ressentiments distingués, de Jean-François Marquet, Joca Seria, 94 pp., 7,50€, ISBN: 9782848092843.