Terre trois fois maudite, de César Ramiro Vásconez

Publié le 09/05/2016 par Carole Poujade
Terre trois fois maudite
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Dans Terre trois fois maudite, César Ramiro Vásconez nous amène en voyage en Equateur et ailleurs. L’odeur de soufre est omniprésente... Lecture de Carole Poujade.

C'est sous un format épistolaire que le monde littéraire, politique, économique et social des années 30 apparaît peu à peu sous nos yeux de lecteurs quelque peu égarés. César Ramiro Vásconez, jeune auteur équatorien, dresse, au fil des pages, un portrait-fiction de l'écrivain-poète Alfredo Gangotena, dont il imagine des lettres et confidences, sur 10 ans de vie écoulée principalement entre Quito, Paris et Valparaiso.

Son nom, Gangotena, n'est jamais cité dans l'ouvrage, alors qu'il en est le narrateur sous la plume bien sûr avertie de Vásconez; et il a donné indirectement son titre à l'ouvrage : “Oh terre! Terre trois fois maudite, cette fois-ci, ô Terre! Je te contemple animé de toute la haine dont mes yeux seront un jour capables.”

S'inscrivant dans la veine d'Henri Michaud dont il était ami, il avait pour particularité, bien qu'Équatorien, d'écrire en français. Les mots choisis de César Ramiro Vásconez nous font découvrir son parcours socialement privilégié, d'abord étudiant en France, puis à la tête d'une hacienda, avant d'être attaché culturel à Paris puis à Valparaiso (Chili).

Sous la plume de Vásconez, Gangotena exprime son violent mépris des indigènes et des domestiques, mais aussi son dégoût des diplomates et politiques, voire de l'homme en général : “Fort heureusement les chimpanzés n'ont pas la capacité d'avoir honte de leur descendance bipède et imberbe.”

Cette introspection dans les pensées les plus profondes, complexes, contradictoires parfois, d'un écorché est aussi l'expression libre d'une vision cynique de l'Équateur, son organisation économique, ses guerres (contre le Pérou), sa corruption... Expérience des amours perdues, ou recherches médicamenteuses; l'odeur de soufre est omniprésente, celle bien sûr de cette terre volcanique, de ce pays brûlé en particulier par la lave du Chimborazo, plus haut volcan d'Équateur. On notera aussi quelques passages profonds et moins douloureux sur la création artistique et réflexions sur les langues quechua, espagnol, anglais et français.


Terre trois fois maudite, de César Ramiro Vásconez, Éditions Les bilingues MEET, 289 p, 15€, ISBN 978 2 911686 97 9