Des racines pour la création : quand la tapisserie de l'Apocalypse nourrit des auteurs en résidence

Publié le 14/03/2017 par Antoinette Bois de Chesne
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La création surgit dans un présent donné, et plonge ses racines loin dans le temps et sait se nourrir de tout, y compris du patrimoine. Le mot est chargé. 

Son étymologie le rattache à l’héritage du père – le beau mot de « matrimoine » est, lui, presque tombé dans l’oubli. Le patrimoine induit la conservation des œuvres ; pour les garder vivantes et parlantes, la transmission est une nécessité. Et lorsque c’est la langue, via l’écriture, qui investit cet espace de transmission, bien des choses peuvent alors advenir, comme en témoigne la résidence d’écriture de la ville d’Angers.

Dès sa création, en 2011, la résidence se déploie sur l’ensemble de la ville. L’objectif est de faire découvrir la littérature contemporaine à tous les habitants, y compris les plus éloignés de l’offre culturelle. Les auteurs invités au fil des années consacrent 70 % de leur temps à leurs créations personnelles et 30 % à des actions culturelles. Si, d'invitation en invitation, les écrivains sont accueillis dans des quartiers différents, la commande attachée à la résidence ne varie pas : la bibliothèque passe commande d’un texte, dans une forme littéraire libre, sur le thème universel de l’Apocalypse qui fait écho à la tenture monumentale du 14ème siècle conservée au château d'Angers. Chaque création peut être envisagée à avec la plus grande liberté. Au bout de cinq ans, les textes ont été réunis dans un livre édité par Joca Seria, Écrire l’Apocalypse, paru en novembre 2016.

Inattendus dans leur forme comme dans leur propos, les textes déplacent le lecteur dans ses représentations en actualisant le thème de l'Apocalypse au prisme de notre XXIème siècle. Les cinq pièces singulières tissées par Emmanuel Adely, Jean-Pascal Dubost, Patrick Goujon, Eric Pessan et Carole Zalberg, s’inscrivent dans une longue tradition littéraire. Elles prolongent et enrichissent le dialogue artistique instauré par Jean Lurçat au milieu des années 50 avec son Chant du monde, et poursuivi encore très récemment par l’installation magistrale de Claire Morgane, Plenty More Fish in the Sea.

Ces nouvelles pousses au bout des rameaux tiennent la promesse de l’arbre : l’art se renouvelle en puisant aussi dans ce qui l’a précédé pour faire émerger des formes inédites.

Écrire l'Apocalypse, Emmanuel Adely, Jean-Pascal Dubost, Patrick Goujon, Éric Pessan, Carole Zalberg, éditions Joca Seria, 104 p., 10 € - 978-284809-278-2

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