Livre cherche futur

Publié le 20/06/2019 par Patrice Lumeau
Le projet Future Library (en norvégien : Framtidsbiblioteket ) est une œuvre d'art public qui vise à rassembler une œuvre originale d'un écrivain populaire chaque année de 2014 à 2114.
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Mardi 11 juin 2109, la sentence tombe. « Le futur du livre commence aujourd’hui ». La filière du livre a besoin d’être questionnée, plus que jamais. 

Emmanuelle Garcia, directrice de Mobilis, rappelle au passage que si l’on n’a jamais autant lu, les inquiétudes sont nombreuses. Livre et développement durable sont au cœur de cette journée. Mobilis, déjà engagé dans une réflexion « verte », souhaite agiter la question de la transition écologique et transmettre ce virus à tous les acteurs de la filière.

La journée s’annonce comme un parcours progressif. Walter Bouvais (consultant spécialisé en développement durable) rappelle que « rien n’est écrit », à chacun d’écrire son histoire, à nous d’inventer demain. Et pour commencer, posons le livre au centre du débat et de la pièce. À l’invitation de Walter Bouvais, chacun des participants qui possède un livre vient le déposer au milieu de la pièce, comme on dépose une présence bienveillante qui habite notre quotidien. Puis, sur une proposition d’Isabelle Anniecke (experte en intelligence collective) les participants se lèvent à l’énoncé de leur profession. Et de découvrir que, du forestier au lecteur, les métiers du livre sont bien représentés. Renaud Combes, à la facilitation graphique, s'active sur une grande fresque - post-it interdits - et se charge de représenter les idées énoncées au fur et à mesure de la journée.

Une fois les présentations effectuées, la réflexion s’invite gentiment à chacune des tables de bistrot, où l’assistance est repartie par groupe de trois ou quatre. Chacune des 14 tablées repère les aspects positifs et négatifs du métier figurant sur la fiche qui lui est confiée - autant de maillons de la chaîne du livre. 

Dans un premier temps, une soixantaine de cerveaux s’agitent. Exemple : le métier d’imprimeur est passé à la moulinette. Autant on lui trouve griefs (pollution, déforestation, délocalisation) autant on peine à priori à lui accorder des bons points. Pourtant petit à petit ils émergent. Rôle de diffuseur de la culture par le biais d'un bel objet, espace de R&D pour rationnaliser les tirages... À la table d’à côté, la réflexion porte sur le livre d’occasion. Hasard du jeu, Vincent Gillet, responsable de Recyclivre pour le grand Ouest, fait partie du groupe et maîtrise la question de la seconde vie du livre. S’ensuit une mise en commun qui laisse la place aux échanges d’idées et aussi aux précisions apportées par les différents professionnels présents. Ce temps permet de plonger plus au cœur de la filière et d’en percevoir les enjeux, les failles, les atouts.

Avant de clore la matinée, Walter Bouvais, replace ces échanges au cœur d’un débat plus vaste. Un silence de glace s’installe à l’évocation du réchauffement climatique et de la disparition des espèces. « Nous faisons partie du vivant », rappelle Walter Bouvais au cas où, pris dans le feu de nos activités, cette évidence nous aurait échappé. Loin de vouloir infliger un vent pessimiste, le consultant note que la nature est un puissant réservoir d’idées. Elle a de fabuleuses histoires à nous conter. À nous de nous en inspirer.

L’après-midi s’enclenche à vive allure participative. Travaillons à l'émergence de nouvelles pratiques ! En petits groupes, voyageant de table en table selon un ordre aléatoire, chacun est invité à s’interroger sur les changements à venir. Puis place à l’imagination : dessiner une filière exemplaire en 2025. Les participants, souvent peu habitués au maniement du stylo feutre se livrent au dessin. Les débats s’intensifient. Quels leviers mettre en œuvre pour dessiner les contours d'une filière rêvée ? Les échanges fusent, les cerveaux chauffent. S’amuser en travaillant. Une réflexion sincère est en route. Des projets porteurs de changements concrets émergent, où il apparaît que de réflexions variées naissent des projets analogues. Parmi eux, retenons la sensibilisation aux enjeux propres à la filière, exemple : réaliser un Manuel écologique du professionnel du livre. Éveiller les consciences ! L’idée d’une coopérative locale du livre fuse, rejoignant plus généralement la notion de travailler en collectif et dans le respect de chacun.

Mobilis, agitateur de la filière remplit son rôle. Stéphanie Lechêne, chargée de l'animation du réseau à Mobilis, rappelle à point nommé les vertus d’une journée participative. Les idées existent pour infléchir la filière vers un modèle plus vertueux. La logique marchande n’est pas la seule qui vaut. Le chantier, conséquent, consiste à mettre en œuvre ces idées afin que le livre prenne la « tangente verte » rapidement, disons... maintenant !