David Demartis, est l’éditeur des éditions Le Murmure tout récemment devenues nantaises. Il nous présente son catalogue et parle des croisements qu'il souhaite développer avec les professionnels du livre, en Pays de la Loire et ailleurs, thématique qui lui est chère et commune à Mobilis.
Les éditions Le Murmure ont déménagé récemment de Bourgogne aux Pays de la Loire, et se sont installées à Nantes, rue Geoffroy Drouet. C’est l’occasion de présenter dans la région un catalogue peu banal et pointu.
Peux-tu revenir sur la genèse de ta maison d'édition et sur ce qui motive tes choix éditoriaux ?
Nous nous sommes lancés voilà 15 ans avec Jérôme Martin, avec l'idée de publier des travaux de recherches en lettres et sciences humaines délaissés, de republier des auteurs oubliés du XXème siècle (Gadenne, Hyvernaud, Calet commençaient tout doucement à refaire parler d'eux) et quelques ouvrages en poésie contemporaine étrangère bilingue.
Pour la littérature, ce qui motive notre choix reste la langue qui doit être ciselée, impérativement : Les forteresses de l'oubli de Serge Moncomble ou bien le pavé de Jean-Claude Hémery, Curriculum vitae et autres textes, en sont de belles démonstrations.
Pour les travaux universitaires, l'angle reste celui de la surprise et de la capacité d'un sujet, quel qu'il puisse être, à nous faire réfléchir dans un format court, dénué de notes, avec une bibliographie courte, comme une invitation à en connaître davantage.
Nous présentons souvent et un peu rapidement d'ailleurs, la collection Borderline comme celle des anti Que-sais-je ?
As-tu un public de lecteurs en particulier ?
Notre public est très diversifié en raison de nos différentes collections : la dernière collection, Borderline, nous permet de toucher un public plus jeune. Mais d'une manière générale, et par la force des titres publiés, nous touchons les plus curieux, difficilement le grand public.
Pour découvrir ton catalogue, quel livre conseillerais-tu pour un bibliothécaire, un libraire, un public néophyte… ?
Difficile de réduire un catalogue à un seul titre je dois dire : pour les bibliothécaires et les libraires, peut-être alors le prochain titre de la collection littéraire (en dehors), avec le roman noir de Benoît-Marie Lecoin à paraître à la rentrée, Ringo.
Dans un tout autre style, Les forteresses de l'oubli ou bien encore de la poésie, avec le triptyque de Gabriel Rebourcet, Le Chanteur de Mantoue, absolument magnifique et loin de la façon dont on peut imaginer concevoir et aborder la poésie...
Pour les néophytes, un titre ou deux de la collection Borderline : Malade encore vivant ou bien encore Belles endormies.
Comment es-tu distribué, et où peut-on retrouver tes livres ?
Nous sommes diffusés par Hobo Diffusion, situé à Paris, et distribués par Makassar. On peut retrouver nos ouvrages essentiellement en librairie indé dans toutes les grandes villes françaises.
La maison était jusqu'ici implantée en Bourgogne. As-tu des attentes, des envies, des craintes particulières liées à ce nouvel ancrage nantais ? Que souhaites-tu développer avec les professionnels de la région ?
Je souhaite développer Le Murmure, c'est évident, en rencontrant des professionnels et un public en premier lieu pour s'inscrire sur le territoire. J'ai déjà noué quelques liens professionnels avec des acteurs nantais et j'en suis ravi. Je ne désire pas travailler seul mais croiser des initiatives, effectivement.
Quant à ces initiatives, elles passeront par la rencontre, comme pour la réalisation d'un futur ouvrage. Pas de rencontre, pas de livre. De la même façon, je ne peux savoir précisément ce qui pourrait surgir en termes de projets mais j'en ai le désir.
Je crois à un changement radical des mentalités et des problématiques de la fameuse chaîne du livre : notre prochain chantier est de décloisonner nos métiers. Reproduire le modèle de nos puissants confrères ne nous conduira à rien.
Je parle évidemment des grands éditeurs et des grands libraires. Leur logique est celle de groupes d'intérêts économiques qui tentent de dégager des marges (de manœuvres) en luttant pied-à-pied contre l'autre... le tout dans une certaine courtoisie.
L'idée que je me fais de l'édition indépendante et de la librairie indépendante n'est pas basée sur une quelconque définition juridique des statuts mais elle rejoint plutôt la préoccupation de Wilfrid Séjeau (Librairie Le Cyprès, à Nevers, et président du groupement Initiales) à propos de la sérendipité.
Cette idée d'indépendance réside pour moi dans la capacité à proposer un peu plus que la demande du marché, à prendre ce risque éditorial minimum, à maintenir ses sens en éveil, de façon permanente.
Cette idée d'un commun entre éditeurs et libraires devrait nous amener non seulement à travailler ensemble, mais à se rapprocher de manière beaucoup plus étroite, et ce, sur tous les plans.
Qu'y a-t-il de commun entre un épicier de quartier et une très grande surface ? On pourrait imaginer une certaine convergence de vues à cause du métier qui consiste, dans les 2 cas, à vendre des produits alimentaires. Il n'en est pourtant rien... et c'est la taille de la structure, et surtout les rapports de force engendrés qui nous obligent à répondre de la sorte. Il faut sortir de cette logique.