Jeudi 18 novembre à partir de 20h, Anne Steiner (sociologue et historienne spécialiste du mouvement anarchiste à la Belle Époque) viendra présenter "révolutionnaire et dandy" paru en avril 2020 aux éditions l'échappée. Elle est notamment l'auteure d'une série d'ouvrages autour de la "Belle Époque" (1871-1914) aux éditions l'échappée. Elle a déjà publié : Les en-dehors en 2008 (réédité en 2019), Le Goût de l'émeute en 2012 et Le temps des révoltes populaires en 2015 : une histoire en cartes postales des luttes sociales à la "Belle Époque". Elle a aussi écrit des articles dans la défunte revue papier "Article 11"
Les ouvrages d'Anne Steiner aux éditions l'échappée seront aussi disponibles lors de cette soirée de présentation.
Ce livre retrace l’itinéraire politique d’Eugène Bonaventure Vigo dit Almereyda, né en 1883 dans le midi languedocien et mort en 1917 à l’infirmerie de la prison de Fresnes. Adolescent sans famille dans le Paris de la Belle-Époque, il est incarcéré pour un menu larcin à la prison pour enfants de la Petite Roquette et en sort révolté, anarchiste. C’est l’époque où la CGT défend la grève générale comme unique moyen pour parvenir à l’émancipation des travailleurs. Quand à la SFIO, formée en avril 1905, à partir de plusieurs organisations socialistes, elle comprend un pôle réformiste et un pôle insurrectionnel. Dans cette période d’intense mobilisation sociale (entre 1000 et 1500 grèves par an sur l’ensemble du territoire et dans tous les secteurs de production) c’est l’armée qui est chargée du maintien de l’ordre : les blessés se comptent par centaines et les morts ne sont pas rares. Il importe donc de la combattre par tous les moyens.
Vigo qui collabore au Libertaire sous le nom d’Almereyda prend, à 21 ans, la tête de la section française de l’Association internationale antimilitariste (AIA) fondée en 1904 à Amsterdam. Emprisonné pour provocation à la désobéissance des militaires, il fonde avec plusieurs de ses coinculpés La Guerre sociale, organe de concentration révolutionnaire regroupant anarchistes, syndicalistes et socialistes insurrectionnels. Excellent secrétaire de rédaction, maniant la titraille comme de la dynamite, il en fait le journal le plus subversif de son temps. Toujours sur la brèche, on le retrouve au cœur de toutes les grandes mobilisations de son temps sur le marbre comme sur le pavé. Pour combattre les Camelots du roi, milice des nationalistes antisémites de l’Action française, il crée les Jeunes Gardes, organisation armée semi clandestine, qui riposte aussi aux brutalités policières dans les manifestations.
Mais il échoue à construire le parti révolutionnaire regroupant syndicalistes, socialistes insurrectionnels et anarchistes que les militants de la Guerre sociale appellent de leurs vœux. Découragé, il glisse alors vers le réformisme et se laisse aller à sa passion du journalisme. Fondateur du Bonnet Rouge favorable au bloc des gauches, il est accusé sans relâche par ses vieux ennemis de l’Action française d’être stipendié par les Allemands pour avoir ouvert les colonnes de son quotidien aux partisans de la paix. Accusations qui rencontrent un écho favorable dans certaines sphères gouvernementales. Arrêté, il meurt en prison le 14 août 1917, huit jours après son arrestation dans des circonstances troubles, laissant orphelin un fils de 12 ans, Jean Vigo dont l’œuvre cinématographique portera l’empreinte de sa flamboyante et tragique destinée.