Annie Ernaux, l’auteure des Années (Gallimard 2008), sera l’invitée de la librairie Durance pour une rencontre exceptionnelle autour de son dernier livre, Mémoire de fille.
Depuis son premier livre, Les Armoires vides, publié en 1974, où elle relate son enfance à Yvetot en Normandie, Annie Ernaux n’a cessé de puiser dans sa vie personnelle le matériau qui nourrit toute son œuvre, jusqu’à en tirer une substance sociologique. Avec Mémoire de fille, elle revient sur un épisode marquant de sa jeunesse, à la fois douloureux et empreint d’un sentiment de honte, mainte fois évoqué dans ses livres, mais qu’elle n’a jamais réussi à affronter, à transformer en récit alors même qu’elle en avait la volonté, qu’elle en éprouvait la nécessité.
A travers un lent et minutieux travail de mémoire qu’elle nous fait partager, Annie Ernaux va chercher à lever le voile sur cette jeune fille de 18 ans qu’elle a été et qu’elle a voulu oublier, pour essayer de la comprendre, de retrouver les sentiments qui l’ont animée à l’époque. Pour mettre aussi en lumière l’influence de ces événements de l’été 58 sur ses choix de jeune fille et la femme qu’elle est devenue.
Dans ce nouveau récit, Annie Ernaux nous subjugue encore, donne à ce texte intime et féministe une portée universelle et s’affirme, une nouvelle fois, comme une auteure incontournable de la littérature française.
Rencontre animée par Magali. Lecture d’extraits assurée par le Théâtre de la Ruche.
Le livre
« J'ai voulu l'oublier cette fille. L'oublier vraiment, c'est-à-dire ne plus avoir envie d'écrire sur elle. Ne plus penser que je dois écrire sur elle, son désir, sa folie, son idiotie et son orgueil, sa faim et son sang tari. Je n'y suis jamais parvenue. » Dans Mémoire de fille, Annie Ernaux replonge dans l'été 1958, celui de sa première nuit avec un homme, à la colonie de S dans l'Orne. Nuit dont l'onde de choc s'est propagée violemment dans son corps et sur son existence durant deux années. S'appuyant sur des images indélébiles de sa mémoire, des photos et des lettres écrites à ses amies, elle interroge cette fille qu'elle a été dans un va-et-vient implacable entre hier et aujourd'hui.
L'auteure
Issue d’une famille modeste, Annie Ernaux fut d’abord institutrice, puis professeure certifiée et agrégée de lettres modernes. Très vite, après un premier roman, Les armoires vides publié en 1974 où elle relate déjà son enfance à Yvetot avec ses parents gérants d’un café-épicerie, elle décide de renoncer à la fiction pour se consacrer à des récits au caractère autobiographique.
Elle revient sur le parcours social et la vie de ses parents dans La honte. Elle approfondira plus particulièrement celui de son père avec La place pour lequel elle reçoit le prix Renaudot en 1984. Puis elle racontera sa mère, personnage central à l’origine de son émancipation sociale et intellectuelle, atteinte de la maladie d’Alzheimer avec Je ne suis pas sortie de ma nuit, puis sa mort avec Une femme.
Pour Annie Ernaux, toute expérience vécue doit être dite sous peine d’être perdue, et c’est ainsi que son expérience personnelle se mêle à l’expérience historique. Ainsi raconte-t-elle son avortement dans L’évènement à une époque où il est interdit en France. Mais aussi la condition féminine dans le mariage avec La femme gelée, ou encore ses passions amoureuses et sa sexualité (Passion simple, L’usage de la photo). Elle publie aussi ses journaux intimes qui accompagnent la trame de ses récits (Se perdre, Journal du dehors).
Dans la continuité de ce travail, Annie Ernaux porte aussi un regard sociologique sur son environnement proche, les utilisateurs de R.E.R dans Journal du dehors, ou les clients d’hypermarché dans Regarde les lumières mon amour.
Participants
Magali
Partenaires
Théâtre de la Ruche